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Le débat autour du déboulonnage des statues de Léopold II fait les grands titres de la presse depuis quelques jours. Une pétition en ligne, prenant fin le 30 juin 2020, a déjà recueilli près de 70 000 signatures en faveur de la disparition des représentations de celui qui fut propriétaire du Congo de 1885 à 1908, avant que la souveraineté ne passe à la Belgique.
L’argument de la préservation du patrimoine historique est souvent avancé par les opposants au déboulonnage. Les jeunes FGTB sont d’avis qu’une statue en place publique n’a pas de vocation historique au sens scientifique du terme, mais bien une intention d’hommage ; pour satisfaire les revendications de patrimoine de certains autant que la volonté d’autres à ne pas se voir imposer l’image en public de personnages controversés, et enfin pour ne pas risquer d’envoyer des crapules aux oubliettes de l’histoire, le déboulonnage pourrait se concrétiser en un déplacement de ces bustes ou statues dans un espace pédagogique approprié… en d’autres termes un musée, bâtiment à vocation scientifique et historique.
Les jeunes FGTB pensent que ce débat met surtout en avant une problématique bien plus grande : l’européocentrisme dans l’enseignement de l’histoire et le refus des pays colonisateurs à assumer leur responsabilité dans le pillage des pays colonisés et l’exploitation meurtrière de ses populations. Du propre aveu de la Ministre de l’Education en Fédération Wallonie Bruxelles, l’histoire coloniale est l’une des grandes absentes des programmes d’histoire de l’enseignement obligatoire[1]. L’histoire est encore et toujours enseignée d’un point de vue souvent strictement européen, sans véritablement donner une voix et une perspective aux peuples victimes de guerres et de colonisation.
Léopold II est toujours représenté symboliquement comme le « Roi Bâtisseur », mais bien souvent on ignore d’où venaient les fonds permettant les projets architecturaux de la famille royale et les conditions de travail imposées à celles et ceux qui apportaient les richesses. Le cas royal n’est pas unique : la période des XVème- XVIIème siècles est toujours désignée par l’appellation de « Grandes découvertes » et associée positivement aux noms de Christophe Colomb, Amerigo Vespucci… sans préciser que ces grandes découvertes sont pour les populations natives le début de siècles de massacres et de pillages systématiques de leurs ressources naturelles. La fondation par le capitaine Arthur Phillip de la colonie de Nouvelle-Galles du Sud le 26 juin 1788 marque la date de la fête nationale australienne ; on oublie souvent qu’elle marque le début du cauchemar des populations Aborigènes. Godefroid de Bouillon trône fièrement place Royale ; demandons-nous si sa participation sanguinaire à la Première Croisade est un motif de fierté nationale.
Est-il acceptable au début du XXIème siècle que soient maintenues en place publique des représentations de personnalités dont l’histoire officielle tend à taire les exactions, à occulter ou nier les politiques de ces « grands hommes », pour la plupart issus des castes dirigeantes de leur époque, dont les conséquences se chiffrent en millions de morts et en un pillage organisé des anciennes colonies ?
Les Jeunes FGTB sont d’avis qu’il est urgent d’entamer une décolonisation de l’espace public, combat porté entre autres par le Collectif Mémoire Coloniale et Lutte contre les Discriminations[2], ainsi que d’enseigner une histoire objective de la période coloniale. La critique historique, l’aspect scientifique doivent remplacer l’émotionnel.
Sur le socle de la statue, une plaque précise que le cuivre et l'étain nécessaires à sa réalisation proviennent du Congo Belge et ont été fournis «gracieusement» par l'Union Minière du Haut-Katanga en 1926. Soit 18 ans après le transfert du Congo de Léopold II à la Belgique, 34 ans avant son « indépendance ». L’histoire de la RDC, de son époque coloniale à nos jours, est guidée par un fil rouge d’exploitation de ses ressources par les pays colonisateurs : caoutchouc, ivoire, diamant, or, étain, coltan, …
Serge Jaumin, professeur d’histoire contemporaine à l’ULB, se réjouit du débat qui entoure la symbolique du roi Léopold II car la société évolue ainsi que ses références[3]. Les Jeunes FGTB souhaitent que les références sociétales d’aujourd’hui comme de demain passent par une reconnaissance des crimes de l’histoire coloniale et que cette reconnaissance permette à tout un chacun de comprendre les tenants et aboutissants de l’exploitation capitaliste, toujours d’actualité, des ressources du continent africain par l’Occident.
Les Jeunes FGTB rappellent que l’histoire a été, pendant des siècles, détournée en partie pour glorifier les castes dirigeantes et leurs représentants. En lieu et place d’hommage aux despotes, généraux et autres représentants des classes dominantes et de la gloire au capitalisme, pourquoi la place publique ne rendrait-elle pas hommage aux femmes et aux hommes qui ont lutté au travers de l’histoire pour l’émancipation, la justice et l’égalité entre les peuples ?
[1] https://www.rtbf.be/info/societe/detail_caroline-desir-reaffirme-son-projet-de-rendre-obligatoires-les-cours-sur-l-histoire-du-congo-et-de-la-colonisation?id=10519014
[2] https://www.memoirecoloniale.be/notre-combat
[3] https://www.levif.be/actualite/belgique/serge-jaumin-ulb-se-rejouit-d-un-debat-sur-la-presence-de-statues-de-leopold-ii-dans-l-espace-public/article-news-1298425.html?utm_medium=social_vif&utm_source=Facebook&fbclid=IwAR1LVpSXnH_lT0hQDHfu22hOIdDKsdMgP91KpGCSF84kokxyJQr4hSBoJHE#Echobox=1591790050